Image d'illustration Albert Schweitzer et le Chœur de Saint-Guillaume

Albert Schweitzer et le Chœur de Saint-Guillaume

Nous commémorons, cette année, les 150 ans de la naissance d’Albert Schweitzer (1875-1965) à Kaysersberg. Schweitzer a été un véritable humaniste à la fois philosophe, théologien, organiste, professeur de théologie protestante à l’université de Strasbourg, directeur du séminaire, vicaire à l’église Saint-Thomas, médecin et fondateur de l’hôpital de Lambaréné au Gabon en 1913, pour lequel il reçoit le prix Nobel de la paix en 1952.

Les premières années de sa vie sont intimement liées au Chœur de Saint-Guillaume et à son fondateur Ernest Münch. Il apprend l’orgue, à l’âge de 10 ans, auprès de son frère aîné Eugène Münch à l’église Saint-Etienne de Mulhouse. Alors qu’il est étudiant en philosophie et en théologie à l’université de Strasbourg, Schweitzer accompagne pour la première fois à l’orgue le Chœur de Saint-Guillaume dans La Passion selon saint-Matthieu, les 22 et 23 mars 1894, présentée alors sur deux jours. Schweitzer ne fait pas qu’accompagner à l’orgue, il dirige l’un des deux chœurs en raison de la distance les séparant entre le bas du clocher et le grand orgue. Schweitzer se voit confier la présentation des programmes. Il écrit sur celui de 1894 que la Passion selon saint-Matthieu, « est la plus riche et la plus importante des œuvres de Bach (…). Bach a écrit son œuvre, qui est une œuvre d’art de premier ordre, pour l’Église ».

Lors des 38 concerts du Chœur de Saint-Guillaume, dont 12 Passions, que Schweitzer a accompagnés à l’orgue de 1894 à 1910, il a dû analyser et discuter de leur interprétation avec le chef de chœur Ernest Münch et avec son frère, l’organiste Gottfried Münch. Lorsque Schweitzer publie son ouvrage J.-S. Bach le musicien poète en 1905, il rend hommage au chef et à son chœur dans sa préface : « Voilà 10 ans que Ernest Münch m’a associé en qualité d’organiste, à la belle tâche qu’il a entreprise : faire entendre l’une après l’autre toutes les œuvres vocales de Bach avec le Chœur de Saint-Guillaume de Strasbourg (…) Les chanteurs du Chœur de Saint-Guillaume, si dévoués à la cause de Bach, avec leur vaillant directeur, ont créé cette atmosphère d’enthousiasme autour de moi ». En 1955, Fritz Munch, fils d’Ernest Münch et son successeur à la tête du chœur de 1924 à 1962, écrit à propos de cet ouvrage : « J’ai pour la première fois dans ma vie, pu constater combien l’apparition d’un livre peut changer les choses. Il n’était pas seulement devenu la « bible » des amateurs de Bach (…) et aujourd’hui, après exactement un demi-siècle, il est toujours présent partout où l’on travaille sur Bach ».

Schweitzer décide de se lancer dans des études de médecine pour se mettre au service des pauvres et des malades. Lors d’une visite chez les Münch, en 1906, il apprend par hasard par la presse que le Gabon cherche un médecin, ce qui décidera de sa vocation d’y servir. Après avoir été au service du chœur pendant 16 ans, le 25 mars 1910, Schweitzer accompagne le chœur à l’orgue dans sa septième et dernière Passion selon saint-Matthieu. En 1912, il se marie avec Hélène Bresslau, choriste au Chœur Saint-Guillaume et part avec elle fonder, une année plus tard, l’hôpital de Lambaréné.

Fritz Münch, Albert Schweitzer et Karl Straube, Kantor de Leipzig et Directeur du Thomanerchor, à Strasbourg en octobre 1935. Archives Münch – Chœur de Saint-Guillaume, Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg.

Le 16 octobre 1935, dans le cadre du 250e anniversaire de la naissance de J. S. Bach et du 50e anniversaire du Chœur, Schweitzer accompagne à l’orgue, pour la dernière fois, le Chœur de Saint-Guillaume sous la direction de Karl Straube, 11ème Thomaskantor après Bach. Il accompagne notamment la cantate Singet dem Herrn ein neues Lied (BWV 225). Albert Schweitzer, passeur de la musique instrumentale et vocale de Bach, expliquait les raisons de sa passion pour la musique de Bach, elle « suscite en nous une sérénité tranquille et profonde, un sentiment qui est au-delà de la douleur et de la joie ».